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Composante 3 : Mettre en place des filières agricoles biologiques

Enfin, il est matière à valoriser la production biologique et le commerce équitable des cultures existantes en bordure du PNK dans la zone de Sebitoli (thé en particulier, café mais aussi cultures vivrières) et initier le développement de nouvelles filières (cultures non appétentes pour la grande faune, ricin, vanille, piments biologiques, Prunus africana, pisciculture, insectes comestibles…) afin d’assurer la sécurité alimentaire et développer les revenus, réduire les activités illégales, limiter les problèmes de santé humaine et animale (y compris pollinisateurs) et inciter les communautés à collaborer à la préservation de l’environnement.

1) Réalisation d’une étude de faisabilité technique et économique des activités agricoles génératrices de revenus et de protéines dans les villages

En réalisant cette étude, NARO en collaboration avec URDT Kahangi Estate sous la supervision de Kinomé  cherche à identifier les besoins des communautés villageoises pour l’autoconsommation et la génération de revenus, qui réduisent par ailleurs l’attrait des communautés pour les activités illégales. Ils s’agit donc de mettre en place différentes cultures telles que la pisciculture, le café, la vanille,... Les communautés et les chefs de village (LC1 des villages identifiés) ont déjà exprimé leur intérêt pour fournir des terrains ces cultures et projets innovants, du fait de leur potentiel pour la diversification des sources de revenus et pour la captation d’une forte valeur ajoutée. Dans un second temps, basé sur les expériences et les résultats des recherches déjà existantes de NARO, les équipes liées au projet FoFauPopU réalisent une étude de la faisabilité économique et agronomique des différentes productions identifiées. L’étude de faisabilité agronomique est réalisée par Kinomé. il s’agira d’analyser le potentiel de développement des filières à l’échelle du territoire, en gardant à l’esprit que l’objectif est de répondre aux besoins des populations, en termes d’autoconsommation (sécurité alimentaire locale) et de génération de revenu et d’inciter les communautés à adopter des pratiques agro-écologiques compatibles avec la préservation de la faune sauvage.

 

2) Développement d'activités agricoles génératrices de revenus avec les comités environnementaux des villages

Le programme FoFauPopU avec l’assistance technique de NARO et de Kahangi Estate fournit la formation et le matériel nécessaire au démarrage des nouvelles activités agricoles identifiées. Pour un premier financement, les villages seront sélectionnés en fonction de leur implication générale, dans le programme et de leur évolution en matière de gouvernance collective. Le comptage des pièges et l'analyse des vidéos des caméra-traps viendront confirmer ou infirmer cette implication. Il sera suivi village par village dans le temps et le niveau de soutien sera corrélé à son évolution (réduction des pièges = augmentation des moyens). Les années suivantes, le financement des villages les plus méritants seront renforcés en priorité. Le renforcement des activités positives concernant l'essence Prunus africana est indispensable afin de réduire les prélèvements illégaux en forêt. Il est d'une part indispensable de démanteler ces réseaux braconniers avec l'aide de l'UWA et d'autre part de contrôler l'origine des produits, « issus de plantations durables » afin de répondre à la demande du marché et d'assurer la traçabilité du produit. La valorisation (économique, sociale, environnementale) des filières  sera un outil de lutte contre les activités illégales. Des sessions de formations seront organisées par NARO et Kahangi Estate afin de renforcer les capacités des producteurs sur les exigences culturales des nouvelles filières mises en place. Les communautés seront également accompagnées par filière sur les questions d’organisation : organisations entre producteurs (groupements de producteurs) pour faciliter la production et la mise en marché notamment.

3) Sensibilisation des sociétés productrices de thé en bordure du PNK à l'agroécologie 

Le dialogue avec les sociétés de thé est déjà engagé par le biais des différents projets mis en place précédemment par SCP avec les deux sociétés (suivi de santé, suivi alimentaire, sensibilisation). En marge des ateliers de sensibilisation, des enquêtes anonymes (au moyen d'une boite où sont glissées des réponses) ont été conduites sur la consommation de viande de brousse par les ouvriers. Les gestionnaires ont toujours accueilli avec beaucoup d'enthousiasme les propositions qui allaient dans le sens de l'amélioration des conditions de vie des ouvriers et qui s'inscrivent dans le cahier des charges du Commerce Equitable (CE). Le CE peut donc être un tremplin et un levier pour favoriser le passage à la production biologique. NARO, PCGS, Kahangi Estate et Kinomé informeront, lors de réunions informelles, les gestionnaires et les responsables techniques des sociétés de thé riveraines du parc sur ces effets conjoints des certifications et sur les conséquences des usages de pesticides et engrais chimiques, et en particulier des pesticides obsolètes et mal employés. A l’inverse, une information sera faite sur les rendements du thé biologique (Kahangi Estate), les débouchés et la certification par des entreprises qui sont engagées dans la filière bio (par ex : Palais des Thés; Kahangi Estate). Il s’agira ensuite, pour ceux qui le souhaitent, de les accompagner dans la conversion vers des cultures qui réuniront les trois critères  - biologique, équitable et durable-  permettant une meilleure rémunération des employés (salaire médian actuel de 32 euros/mois selon étude de SCP/PCGS.

4) Accompagnement de la certification et commercialisation de thé biologique dans les zones périphériques de Kibale 

Kinomé  identifiera les exigences socio-environnementales de différents labels biologiques et de commerce équitable, afin d’accompagner les sociétés de thé et des petits producteurs dans une démarche d’amélioration continue tant dans leurs pratiques agronomiques que dans leur gestion des travailleurs (appui technique et sensibilisation). Elles seront également accompagnées dans leurs démarches administratives pour être labellisées ou pour créer elles-mêmes un label biologique. Pour l’instant, le thé est vendu sur le marché de grande consommation (non différencié ou peu différencié, moyen et bas de gamme). Or, des atouts certains permettraient d’améliorer sa valorisation par la différenciation sur des marchés de niche biologiques : sa situation en bordure de Parc National, la biodiversité alentour, la cueillette à la main… Le différentiel de prix (la prime) généré grâce à l’accès à des marchés valorisant les efforts réalisés ainsi que les débouchés éventuels (des contacts prometteurs ont déjà été établis avec des acheteurs, notamment le Palais des Thés et "It’s Wild" de COMACO) serviront d’incitation pour la transition vers des pratiques écologiques et socialement responsables. Dans ce contexte, une procédure "donnant-donnant" peut être proposée : FoFauPopU les aide à obtenir la certification bio qui leur permettra d'accéder à des marchés plus rentables et en contrepartie, il s'engage à veiller au patrimoine naturel: un thé bio et "chimpanzee/elephant friendly" pouvant être commercialement porteur.

5) Accompagnement de l'accès au marché biologique et au commerce équitable des produits issus des activités génératrices de revenus et des cultures de subsitution 

Sur la base des études de marché réalisées en amont, et des attentes exprimées par les comités sociaux et environnementaux, un plan d’affaire succinct sera établi pour chaque projet villageois. Une analyse de la chaine de valeur sera établie avec l’aide de Kinomé pour progressivement intégrer les différentes étapes de valeur ajoutée (production, première transformation, stockage, commercialisation) et établir un plan d’investissement en fonction des options d’intégration retenues. Les principes fondamentaux du projet de COMACO seront conservés : construction progressive et consolidation dans la durée d’une relation de confiance et d’autonomisation des producteurs locaux ; accès facilité aux bonnes pratiques agricoles (agro-écologie) et au marché en échange de la cessation du braconnage et des coupes illégales de bois (dont Prunus africana) ; intégration progressive de la chaîne de valeur. Cependant, les modalités de mise en oeuvre devront cependant être adaptées aux difficultés du contexte local. Le volet « développement des filières » projet sera donc une évolution du modèle COMACO, avec comme objectif l’autonomisation progressive des 6 villages, puis à terme de l’ensemble des communautés limitrophes du PNK,  et la contribution à un modèle de conservation de plus en plus participative et génératrice de développement local. Le programme FoFauPopU s’appuiera également sur l’exemple de COMACO pour permettre aux producteurs de valoriser économiquement leur production via la création d’un label ou l’utilisation de la marque "It’s Wild", dont le principe est d’offrir la possibilité aux producteurs de revendre leur surplus à la marque, qui leur verse ensuite une prime conditionnée par l’adoption de pratiques respectueuses de l’environnement.